Les églises, un patrimoine à transformer
Vue de l’Espace Péribonka, qui intègre l’église Saint-Édouard, Péribonka, Photo: La Presse
Les églises ont longtemps occupé un rôle central dans la vie sociale et communautaire de presque toutes les municipalités du Québec. Encore aujourd’hui, elles représentent un point de repère important dans le cadre bâti et le paysage, et les populations locales y sont attachées. Cependant, la baisse constante de leur fréquentation depuis la Révolution tranquille fragilise les fabriques qui se retrouvent avec des bâtiments vieillissants et coûteux à entretenir. Plusieurs d’entre elles doivent ainsi se résoudre à se départir de leur bien.
En 2003, le Conseil du patrimoine religieux du Québec a réalisé un inventaire dénombrant 2 751 lieux de culte construits avant 1976 partout au Québec. De ce nombre, 802 églises, soit près de 30 %, ont perdu leur vocation première en date du 31 décembre 2023, c’est-à-dire qu’elles ont été démolies, fermées ou recyclées. Au Saguenay–Lac-Saint-Jean, depuis 2003, ce sont huit églises qui ont été démolies, tandis qu’une vingtaine ont été recyclées en plateaux sportifs, résidences, centres multifonctions ou communautaires et commerces. Sept églises sont aujourd’hui fermées.
L’avenir des églises est donc un sujet qui revient fréquemment dans l’actualité, au fil des annonces de fermeture et de reconversion. Si plusieurs églises passent malheureusement sous le pic des démolisseurs, la reconversion de plusieurs lieux de culte a permis de mettre en valeur et de pérenniser ces bâtiments patrimoniaux, en plus de participer à la revitalisation des coeurs villageois. Voyons ensemble quelques exemples intéressants de reconversions d’églises qui ont permis de revitaliser ces bâtiments.
Des exemples de reconversions intéressantes au Saguenay–Lac-Saint-Jean
À l’échelle du Québec, plusieurs municipalités reprennent les églises de leur communauté pour en faire des espaces communautaires et municipaux. C’est le cas à Saint-Stanislas, où le centre multifonctionnel Au Clocher a ouvert ses portes dans l’ancienne église du village en 2016. Le projet visait à doter Saint-Stanislas d’un espace intergénérationnel offrant une foule de services : bibliothèque, salle de visionnement, restaurant, épicerie, centre de conditionnement physique et mur d’escalade. Les aménagements extérieurs de l’église ont été planifiés en parallèle par un comité de citoyen accompagné par le SARP. Si l’intérieur de l’église a complètement été réaménagé, l’église conserve sa forme et son architecture d’origine, en plus de redevenir un lieu de rassemblement pour la population stanissoise.
Un autre exemple de projet de reconversion d’église porté par le milieu municipal est celui de l’église Saint-Édouard de Péribonka, aujourd’hui intégrée à un complexe regroupant l’hôtel de ville, une bibliothèque, des organismes communautaires ainsi que le musée Louis-Hémon. Le musée, auparavant situé en périphérie du noyau villageois, occupe désormais l’ancienne église. Le projet s’inscrit dans une volonté plus large de la municipalité de devenir un pôle d’attraction touristique et de redynamiser le coeur historique de Péribonka.
D’autres églises sont plutôt reprises par des entrepreneurs, qui y implantent leur commerce, comme le centre d’escalade Beta Crux, qui a ouvert ses portes en 2017 dans l’ancienne église Christ-Roi au centre-ville de Chicoutimi. Grâce à son intérieur vaste et à la hauteur de ses murs, l’architecture de l’église a permis l’implantation d’infrastructures d’escalade en hauteur. Le succès de l’entreprise a ainsi permis de maintenir l’église inoccupée jusqu’alors pendant quelques années et qui fait partie du site patrimonial de l’Église- Christ-Roi, cité par la ville de Saguenay en 2006.
À Alma, un commerce a ouvert ses portes en 2022 dans l’ancienne église Sainte-Marie-de-L’Isle-Maligne, fermée et désacralisée la même année. Le Saint-Crème, aujourd’hui bien connu à Alma, offre une crèmerie et une bagelerie, ainsi qu’une dizaine de chambres d’hôtel.
Les retombées des projets
Ces projets démontrent bien tout le potentiel qu’ont les églises pour être reconverties. Les possibilités de reconversion sont pratiquement infinies, et peuvent se décliner selon les besoins des milieux. La pratique religieuse n’étant plus suffisante pour maintenir et entretenir les édifices, ces projets représentent une rare occasion de rénover et de restaurer ces lieux de culte, qui sont autrement à risque d’être démolis. Si la reconversion des lieux de culte suscite parfois l’inquiétude des paroissiens, qui craignent que leurs églises soient dénaturées, les projets de reconversion cherchent pratiquement tous à conserver le caractère patrimonial et religieux du bâtiment. Les églises reconverties conservent ainsi généralement leur forme, leur clocher, leurs vitraux et les caractéristiques architecturales particulières à chacune.
De plus, grâce à ces reconversions, les églises, historiquement des lieux de rassemblement et de rencontre, retrouvent, grâce à ces initiatives, leur vocation et leur lustre d’antan. Tout en répondant mieux aux besoins de la communauté, ces bâtiments patrimoniaux auxquels les populations locales attachent généralement une grande importance, peuvent être mis en valeur et pérennisés.
D’autres projets de reconversions dans un futur rapproché
D’autres églises sont actuellement en transition dans la région, à des stades plus ou moins avancés. Par exemple, à Saint-Gédéon, une annexe à l’église Saint-Antoine-de-Padoue est actuellement en construction, dans l’objectif de transformer le lieu en salle multifonctionnelle, pouvant accueillir des spectacles et des évènements. À Sainte-Monique et à Lamarche, des comités sont actuellement en réflexion afin de trouver une nouvelle vocation à leur église. À Alma, le spectacle de la Quête, tenu le 1er mai dernier, a permis de lever des fonds pour la restauration de l’église Saint-Joseph-d’Alma. Nous aurons sans doute d’autres beaux exemples de reconversions à discuter dans les prochaines années !
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